Entracte
QUATRIÈME ACTE
Chœur
CHOEUR
A deux cuartos, A deux cuartos,
A deux cuartos, A deux cuartos,
A deux cuartos, A deux cuartos,
A deux cuartos, A deux cuartos,
Des éventails pour s'éventer,
Des oranges pour grignoter,
Le programme avec les détails!
Du vin! De l'eau!
Des cigarettes!
A deux cuartos, A deux cuartos,
A deux cuartos, A deux cuartos,
Voyez! À deux cuartos!
Señoras et Caballeros.
Pendant ce premier choeur sont entrés les deux officiers du deuxième acte, ayant au bras les deux bohémiennes Mercédès et Frasquita.
ZUNIGA
Des oranges, vite.
PLUSIEURS MARCHANDS
se précipitant
En voici.
Prenez, prenez, mesdemoiselles.
UN MARCHAND
à l'officier qui paie
Merci, mon officier, merci.
LES AUTRES MARCHANDS
Celles-ci, señor, sont plus belles …
Des éventails pour s'éventer!
Des oranges pour grignoter!
Le programme avec les détails!
Du vin! De l'eau!
Des cigarettes!
ZUNIGA
Holà! Des éventails.
UN BOHÉMIEN
se précipitant
Voulez-vous aussi des lorgnettes?
CHOEUR
A deux cuartos, A deux cuartos,
A deux cuartos, A deux cuartos,
Voyez à deux cuartos,
Senoras et Caballeros!
A deux cuartos, A deux cuartos,
A deux cuartos,
Voyez! Voyez!
N° 24 Marche et Chœur
CHŒUR
Les voici! les voici!voici la quadrille!
Les voici! oui,les voici!voici la quadrille!
Les voici! voici la quadrille!
La quadrille des toréros!
Sur les lances le soleil brille!
En l'air, en l'air, en l'air,en l'air toques et sombreros!
Les voici! voici la quadrille,
la quadrille des toréros!
Voici, débouchant sur la place,
voici d'abord, marchant au pas,
voici d'abord, marchant au pas,
l'alguazil à vilaine face!
À bas! à bas! à bas!
À bas l'alguazil! à bas!
À bas! à bas! à bas!
Et puis saluons au passage,
saluons les hardis chulos!
Rravo! viva! gloire au courage!
Voici les hardis chulos!
Voyez les banderilleros!
Voyez quel air de crânerie!
Voyez! voyez! voyez! voyez!
Quel regards, et de quel éclat
étincelle la broderie
de leur costume de combat!
Voici les banderilleros!
Une autre quadrille s'avance!
Voyez les picadors!
Comme ils sont beaux!
Comme ils vont du fer de leur lance,
harceler le flanc des taureaux!
(Paraît enfin Escamillo, ayant près de lui Carmen, radieuse et dans un costume éclatant.)
L'Espada! Escamillo!
C'est l'Espada, la fine lame,
celui qui vient terminer tout,
qui paraît à la fin du drame
et qui frappe le dernier coup!
Vive Escamillo! ah bravo!
Les voici! voici la quadrille! .
La quadrille des toréros!
Sur les lances le soleil brille!
En l'air, en l'air, en l'air,en l'air toques et sombreros!
Les voici! voici la quadrille,
la quadrille des toréros!
Vive Escamillo! ah bravo!
ESCAMILLO (à Carmen)
Si tu m'aimes, Carmen, tu pourras, tout à l'heure,
être fière de moi.
CARMEN
Ah! je t'aime, Escamillo, je t'aime,
et que je meure si j'ai jamais aimé
quelqu'un autant que toi!
TOUS LES DEUX
Ah! je t'aime!
Oui, je t'aime!
LES ALGUAZILS
Place, place! place! au seigneur Acalde!
(Petite marche à l'orchestre. Sur cette marche entre au fond l'acalde précédé et suivi des alguazils. Pendant ce temps Frasquita et Mercédès s'approchent de Carmen.)
FRASQUITA
Carmen, un bon conseil, ne reste pas ici!
CARMEN
Et pourquoi, s'il te plaît?
MERCÉDÈS
Il est là!
CARMEN
Qui donc?
MERCÉDÈS
Lui, Don José!
Dans la foule il se cache ; regarde.
CARMEN
Oui, je le vois.
FRASQUITA
Prends garde!
CARMEN
Je ne suis pas femme à trembler devant lui.
Je l'attends, et je vais lui parler.
MERCÉDÈS
Carmen, crois-moi, prends garde!
CARMEN
Je ne crains rien!
FRASQUITA
Prends garde!
(L'acalde est entré dans le cirque. Derrière l'acalde, le cortège de la quadrille reprend sa marche et entre dans le cirque. La populace suit…et la foule en se retirant a dégagé Don José…Carmen reste seule au premier plan.)
N° 25 Duo final
CARMEN
C'est toi!
JOSÉ
C'est moi!
CARMEN
L'on m'avait avertie
que tu n'étais pas loin, que tu devais venir ;
l'on m'avait même dit de craindre pour ma vie
mais je suis brave et n'ai pas voulu fuir.
JOSÉ
Je ne menace pas, j'implore, je supplie ;
notre passé, Carmen, je l'oublie.
Oui, nous allons tous deux
commencer une autre vie,
loin d'ici, sous d'autres cieux!
CARMEN
Tu demandes l'impossible,
Carmen jamais n'a menti ;
son âme reste inflexible.
Entre elle et toi, tout est fini.
Jamais je n'ai menti ;
entre nous, tout est fini.
JOSÉ
Carmen, il est temps encore,
oui, il est temps encore.
Ô ma Carmen, laisse-moi
te sauver, toi que j'adore,
et me sauver avec toi!
CARMEN
Non, je sais bien que c'est l'heure,
je sais bien que tu me tueras ;
mais que je vive ou que je meure,
non, non, je ne te céderai pas!
JOSÉ
Carmen, il est temps encore,
oui, il est temps encore.
ô ma Carmen, laisse-moi
te sauver, toi que j'adore ;
ah! laisse-moi te sauver
et me sauver avec toi!
Ô ma Carmen, il est temps encore,
Ah! laisse-moi te sauver, Carmen,
Ah! laisse-moi te sauver, toi que j'adore,
et me sauver avec toi!
CARMEN
Pourquoi t'occuper encore
d'un cœur qui n'est plus à toi?
Non, ce cœur n'est plus à toi!
En vain tu dis : « Je t'adore »,
tu n'obtiendras rien, non, rien de moi.
Ah! c'est en vain,
tu n'obtiendras rien, rien de moi!
JOSÉ
Tu ne m'aimes donc plus?
(Silence de Carmen.)
Tu ne m'aimes donc plus?
CARMEN
Non, je ne t'aime plus.
JOSÉ
Mais moi, Carmen, je t'aime encore ;
Carmen, hélas! moi, je t'adore!
CARMEN
À quoi bon tout cela? Que de mots superflus!
JOSÉ
Carmen, je t'aime, je t'adore!
Eh bien, s'il le faut, pour te plaire,
je resterai bandit, tout ce que tu voudras -
tout, tu m'entends? Tout!
mais ne me quitte pas,
ô ma Carmen,
ah! souviens-toi, souviens-toi du passé!
Nous nous aimions naguère!
Ah! ne me quitte pas, Carmen,
ah, ne me quitte pas!
CARMEN
Jamais Carmen ne cédera!
Libre elle est née et libre elle mourra!
CHŒUR et FANFARES (dans le cirque)
Viva! viva! la course est belle!
Viva! sur le sable sanglant
le taureau, le taureau s'élance!
Voyez! voyez! voyez!
Le taureau qu'on harcèle
en bondissant s'élance, voyez!
Frappé juste, en plein cœur,
voyez! voyez! voyez!
Victoire!
(Pendant ce chœur, silence de Carmen et de Don José… Tous deux écoutent… Don José ne perd pas Carmen de vue… Le chœur terminé, Carmen fait un pas vers le cirque.)
JOSÉ (se plaçant devant elle)
Où vas-tu?
CARMEN
Laisse-moi!
JOSÉ
Cet homme qu'on acclame,
c'est ton nouvel amant!
CARMEN
Laisse-moi! laisse-moi!
JOSÉ
Sur mon âme,
tu ne passeras pas,
Carmen, c'est moi que tu suivras!
CARMEN
Laisse-moi, Don José, je ne te suivrai pas.
JOSÉ
Tu vas le retrouver.
Dis…tu l'aimes donc?
CARMEN
Je l'aime!
Je l'aime, et devant la mort même,
je répéterai que je l'aime!
(fanfares et reprise du chœur dans le cirque)
CHŒUR
Viva! la course est belle! etc.
JOSÉ
Ainsi, le salut de mon âme,
je l'aurai perdu pour que toi,
pour que tu t'en ailles, infâme,
entre ses bras, rire de moi!
Non, par le sang, tu n'iras pas!
Carmen, c'est moi que tu suivras!
CARMEN
Non! non! jamais!
JOSÉ
Je suis las de te menacer!
CARMEN
Eh bien! frappe-moi donc, ou laisse-moi
passer!
CHŒUR
Victoire!
JOSÉ
Pour la dernière fois, démon,
veux-tu me suivre?
CARMEN
Non! non!
Cette bague autrefois,
tu me l'avais donnée,
tiens!
(Elle la jette à la volée.)
JOSÉ
(le poignard à la main, s'avançant sur Carmen)
Eh bien, damnée!
(Carmen recule. José la poursuit. Pendant ce temps, fanfares dans le cirque.)
CHŒUR
Toréador, en garde!
Et songe bien, oui, songe en combattant,
qu'un œil noir te regarde,
et que l'amour t'attend!
Toréador, l'amour t'attend!
(José a frappé Carmen. Elle tombe morte…Le vélum s'ouvre. On sort du cirque.)
JOSÉ
Vous pouvez m'arrêter.
C'est moi qui l'ai tuée!
(Escamillo paraît sur les marches du cirque. José se jette sur le corps de Carmen.)
Ah! Carmen! ma Carmen adorée!