Acte III.

Le Theatre change, et represente le Palais du grand Sacrificateur de Cybele.


Scene premiere.

ATIS seul.
Que servent les faveurs que nous fait la Fortune
Quand l'Amour nous rend malheureux?
Je pers l'unique bien qui peut combler mes voeux,
Et tout autre bien m'importune.
Que servent les faveurs que nous fait la Fortune
Quand l'Amour nous rend malheureux?



Scene II.


Idas, Doris, Atys.

IDAS
Peut-on ici parler sans feindre?

ATYS
Je commande en ces lieux, vous n'y devés rien craindre.

DORIS
Mon frere est votre ami.

IDAS
Fiez-vous à ma soeur.

ATYS
Vous devés avec moi partager mon bonheur.

IDAS ET DORIS
Nous venons partager vos mortelles allarmes;
Sangaride les yeux en larmes
Nous vient d'ouvrir son coeur.

ATYS
L'heure aproche où l'Hymen voudra qu'elle se livre
Au pouvoir d'un heureux Epoux.

IDAS ET DORIS
Elle ne peut vivre
Pour un autre que pour vous.

ATYS
Qui peut la dégager du devoir qui la presse?

IDAS ET DORIS
Elle veut elle-même aux pieds de la Déesse
Déclarer hautement vos secrettes amours.

ATYS
Cybele pour moi s'interesse,
J'ose tout esperer de son divin secours .....
Mais quoi, trahir le Roi! tromper son esperance!
De tant de bien reçus est-ce la récompense?

IDAS ET DORIS
Dans l'Empire amoureux
Le devoir n'a point de puissance;
L'Amour dispence
Les Rivaux d'être genereux;
Il faut souvent pour devenir heureux
Qu'il en coûte un peu d'innocence.

ATYS
Je souhaite, je crains, je veux, je me repens.

IDAS ET DORIS
Verrez-vous un Rival heureux à vos dépens?

ATYS
Je ne puis me résoudre à cette violence.

ATYS IDAS ET DORIS
En vain, un coeur, incertain de son choix
Met en balance mille fois
L'Amour et la reconnoissance,
L'Amour toujours emporte la balance.

ATYS
Le plus juste parti cede enfin au plus fort.
Allez, prenés soin de mon sort,
Que Sangaride ici se rende en diligence.



Scene III.

ATIS seul.
Nous pouvons nous flater de l'espoir le plus doux
Cybele et l'Amour sont pour nous.
Mais du devoir trahi j'entens la voix pressante
Qui m'accuse et qui m'épouvente.
Laisse mon coeur en paix, impuissante vertu,
N'ai-je point assez combattu?
Quand l'Amour malgré toi me contraint à me rendre,
Que me demande-tu?
Puis-que tu ne peux me défendre
Que me sert-il d'entendre
Les vains reproches que tu fais?
Impuissante vertu laisse mon coeur en paix.
Mais le sommeil vient me surprendre,
Je combats vainement sa charmante douceur.
Il faut laisser suspendre
Les troubles de mon coeur.

Atys s'endort.



Scene IV.


Le Theatre change, et represente un Antre entouré de Pavots et de Ruisseaux, où le Dieu du Sommeil se vient rendre accompagné des Songes agreables et funestes.

Atys dormant. Le Sommeil, Morphée, Phobetor, Phantase, Les Songes agreables. Les Songes funestes.

LE SOMMEIL.
Dormons, dormons tous;
Ah que le repos est doux!

MORPHÉE
Regnez, divin Sommeil, régnés sur tout le monde,
Répandés vos pavots les plus assoupissans;
Calmés les soins, charmés les sens,
Retenés tous les coeurs dans une paix profonde.

PHOBETOR
Ne vous faites point violence,
Coulés, murmurez, clairs ruisseaux,
Il n'est permis qu'au bruit des eaux
De troubler la douceur d'un si charmant silence.

LE SOMMEIL, MORPHÉE, PHOBETOR ET PHANTASE
Dormons, dormons tous,
Ah que le repos est doux!

Les Songes agreables aprochent d'Atys, et par leurs chants et par leurs dances, lui font connoître l'amour de Cybele, et le bonheur qu'il en doit esperer.

MORPHÉE
Escoute, écoute Atys la gloire qui t'appelle,
Sois sensible à l'honneur d'être aimé de Cybele,
Joüis heureux Atys de ta felicité.

MORPHÉE, PHOBETOR ET PHANTASE
Mais souviens-toi que la Beauté,
Quand elle est immortelle,
Demande la fidelité
D'une amour éternelle.

PHANTASE
Que l'Amour a d'attraits
Lors qu'il commence
A faire sentir sa puissance!
Que l'Amour a d'attraits
Lors qu'il commence
Pour ne finir jamais.

Trop heureux un Amant
Qu'Amour exemte
Des peines d'une longue attente!
Trop heureux un Amant
Qu'Amour exemte
De crainte et de tourment!

PHOBETOR
Goûte en paix chaque jour une douceur nouvelle,
Partage l'heureux sort d'une Divinité,
Ne vante plus la liberté,
Il n'en est point du prix d'une chaîne si belle.

MORPHÉE, PHOBETOR ET PHANTASE
Mais souviens-toi que la Beauté,
Quand elle est immortelle,
Demande la fidelité
D'une amour éternelle.

PHANTASE
Que l'Amour a d'attraits
Lors qu'il commence
A faire sentir sa puissance!
Que l'Amour a d'attraits
Lors qu'il commence
Pour ne finir jamais.

Les Songes funestes approchent d'Atys, et le menacent de la vengeance de Cybele s'il méprise son amour, et s'il ne l'aime pas avec fidélité.


Un Songe funestes.

Garde-toi d'offencer un amour glorieux,
C'est pour toi que Cibele abandonne les Cieux,
Ne trahis point son esperance.
Il n'est point pour les Dieux de mépris innocent,
Ils sont jaloux des coeurs, ils aiment la vengeance,
Il est dangereux qu'on offence
Un amour tout-puissant.

CHOEUR DES SONGES FUNESTES
L'amour qu'on outrage
Se transforme en rage,
Et ne pardonne pas
Aux plus charmans appas.
Si tu n'aime point Cybele
D'une amour fidelle,
Malheureux que tu souffriras!
Tu periras:
Crains une vengeance cruelle,
Tremble, crains un affreux trépas.

Atys épouventé par les Songes funestes, se réveille en sursault, le Sommeil et les Songes disparoissent avec l'Antre où ils étoient, et Atys se retrouve dans le même Palais où il s'étoit endormi.



Scene V.


Atys, Cybele, Melisse.

ATYS
Venez à mon secours, ô Dieux! ô justes Dieux!

CYBELE
Atys ne craignés rien, Cybele est en ces lieux.

ATYS
Pardonnés au desordre où mon coeur s'abandonne;
C'est un songe ...

CYBELE
Parlez, quel songe vous étonne?
Expliqués-moi votre embaras.

ATYS
Les songes sont trompeurs, et je ne les croi pas,
Les plaisirs et les peines
Dont en dormant on est séduit,
Sont des chimeres vaines
Que le réveil détruit.

CYBELE
Ne méprisez pas tant les songes
L'Amour peut emprunter leur voix,
S'ils font souvent des mensonges,
Ils disent vrai quelquefois.
Ils parloient par mon ordre, et vous les devez croire

ATYS
O Ciel!

CYBELE
N'en doutés point, connoisses votre gloire.
Répondés avec liberté,
Je vous demande un coeur qui dépend de lui-même.

ATYS
Une grande divinité
Doit s'assurer toujours de mon respect extrême.

CYBELE
Les Dieux dans leur grandeur suprême
Reçoivent tant d'honneurs qu'ils en sont rebutés.
Ils se lassent souvent d'être trop respectés,
Ils sont plus contens qu'on les aime.

ATYS
Je sçai trop ce que je vous doi
Pour manquer de reconnoissance ....



Scene VI.


Sangaride, Cybele, Atys, Melisse.

SANGARIDE se settant aux pieds de Cybele.
J'ai recours à votre puissance,
Reine des Dieux, protegés-moi.
L'interêt d'Atys vous en presse .....

ATYS interrompant Sangaride.
Je parlerai pour vous, que votre crainte cesse.

SANGARIDE
Tous deux unis des plus beaux noeuds ....

ATYS interrompant Sangaride.
Le sang et l'amitié nous unissent tous deux.
Que votre secours la délivre,
Des loix d'un hymen rigoureux,
Ce sont les plus doux de ses voeux
De pouvoir à jamais vous servir et vous suivre.

CYBELE
Les Dieux sont les Protecteurs
De la liberté des coeurs.
Allez ne craignez point le Roi ni sa colere,
J'aurai soin d'appaiser
Le Fleuve Sangar votre Pere;
Atys veut vous favoriser,
Cybele en sa faveur ne peut rien refuser.

ATYS
Ah! ç'en est trop ...

CYBELE
Non, non, il n'est pas necessaire
Que vous cachiez votre bonheur,
Je ne prétens point faire
Un vain Mystere
D'un amour qui vous fait honneur.
Ce n'est point à Cybele à craindre d'en trop dire.
Il est vrai, j'aime Atys, pour lui j'ai tout quitté,
Sans lui je ne veux plus de grandeur ni d'Empire,
Pour ma felicité
Son coeur seul peut suffire.
Allez, Atys lui-même ira vous garantir
De la fatale violence
Où vous ne pouvés consentir.

Sangaride se retire.

CYBELE parle à Atys.
Laissez nous, attendez mes ordres pour partir,
Je prétens vous armer de ma toute-puissance.


Scene VII.


Cybele, Melisse.

CYBELE
Qu'Atys dans ses respects mêle d'indifference!
L'ingrat Atys ne m'aime pas;
L'Amour veut de l'amour, tout autre prix l'offence;
Et souvent le respect et la reconnoissance
Sont l'excuse des coeurs ingrats.

MELISSE
Ce n'est pas un si grand crime
De ne s'exprimer pas bien,
Un coeur qui n'aima jamais rien
Sait peu comment l'amour s'exprime.

CYBELE
Sangaride est aimable, Atys peut tout charmer,
Ils témoignent trop s'estimér,
Et de simples parens sont moins d'intelligence;
Ils se sont aimez dés l'enfance,
Ils pourroient enfin trop s'aimer.
Je crains une amitié que tant d'ardeur anime.
Rien n'est si trompeur que l'estime:
C'est un nom supposé
Qu'on donne quelquefois à l'amour déguisé.
Je prétens m'éclaircir, leur feinte sera vaine.

MELISSE
Quels secrets par les Dieux ne sont point pénétrez?
Deux coeurs à feindre préparez
Ont beau cacher leur chaîne,
On abuse avec peine
Les Dieux par l'Amour éclairez.
Va, Melisse, donne ordre à l'aimable Zephire
D'accomplir promptement tout ce qu'Atys desire.



Scene VIII.

CYBELE seule.
Espoir si cher et si doux,
Ah! pourquoi me trompés-vous?
Des suprêmes grandeurs vous m'avez fait descendre,
Mille coeurs m'adoroient, je les néglige tous,
Je n'en demande qu'un, il a peine à se rendre;
Je ne sens que chagrins et que soupçons jaloux;
Est-ce le sort charmant que je devois attendre?
Espoir si cher, et si doux,
Ah! pourquoi me trompés-vous?
Helas! par tant d'attraits falloit-il me surprendre?
Heureuse si toujours j'avois pû me défendre!
L'Amour qui me flattoit me cachoit son courroux:
C'est donc pour me frapper des plus funestes coups,
Que le cruel Amour m'a fait un coeur si tendre?
Espoir si cher, et si doux,
Ah! pourquoi me trompez-vous.

Fin du troisième Acte.
Acte III.

Le Theatre change, et represente le Palais du grand Sacrificateur de Cybele.


Scene premiere.

ATIS seul.
Que servent les faveurs que nous fait la Fortune
Quand l'Amour nous rend malheureux?
Je pers l'unique bien qui peut combler mes voeux,
Et tout autre bien m'importune.
Que servent les faveurs que nous fait la Fortune
Quand l'Amour nous rend malheureux?



Scene II.


Idas, Doris, Atys.

IDAS
Peut-on ici parler sans feindre?

ATYS
Je commande en ces lieux, vous n'y devés rien craindre.

DORIS
Mon frere est votre ami.

IDAS
Fiez-vous à ma soeur.

ATYS
Vous devés avec moi partager mon bonheur.

IDAS ET DORIS
Nous venons partager vos mortelles allarmes;
Sangaride les yeux en larmes
Nous vient d'ouvrir son coeur.

ATYS
L'heure aproche où l'Hymen voudra qu'elle se livre
Au pouvoir d'un heureux Epoux.

IDAS ET DORIS
Elle ne peut vivre
Pour un autre que pour vous.

ATYS
Qui peut la dégager du devoir qui la presse?

IDAS ET DORIS
Elle veut elle-même aux pieds de la Déesse
Déclarer hautement vos secrettes amours.

ATYS
Cybele pour moi s'interesse,
J'ose tout esperer de son divin secours .....
Mais quoi, trahir le Roi! tromper son esperance!
De tant de bien reçus est-ce la récompense?

IDAS ET DORIS
Dans l'Empire amoureux
Le devoir n'a point de puissance;
L'Amour dispence
Les Rivaux d'être genereux;
Il faut souvent pour devenir heureux
Qu'il en coûte un peu d'innocence.

ATYS
Je souhaite, je crains, je veux, je me repens.

IDAS ET DORIS
Verrez-vous un Rival heureux à vos dépens?

ATYS
Je ne puis me résoudre à cette violence.

ATYS IDAS ET DORIS
En vain, un coeur, incertain de son choix
Met en balance mille fois
L'Amour et la reconnoissance,
L'Amour toujours emporte la balance.

ATYS
Le plus juste parti cede enfin au plus fort.
Allez, prenés soin de mon sort,
Que Sangaride ici se rende en diligence.



Scene III.

ATIS seul.
Nous pouvons nous flater de l'espoir le plus doux
Cybele et l'Amour sont pour nous.
Mais du devoir trahi j'entens la voix pressante
Qui m'accuse et qui m'épouvente.
Laisse mon coeur en paix, impuissante vertu,
N'ai-je point assez combattu?
Quand l'Amour malgré toi me contraint à me rendre,
Que me demande-tu?
Puis-que tu ne peux me défendre
Que me sert-il d'entendre
Les vains reproches que tu fais?
Impuissante vertu laisse mon coeur en paix.
Mais le sommeil vient me surprendre,
Je combats vainement sa charmante douceur.
Il faut laisser suspendre
Les troubles de mon coeur.

Atys s'endort.



Scene IV.


Le Theatre change, et represente un Antre entouré de Pavots et de Ruisseaux, où le Dieu du Sommeil se vient rendre accompagné des Songes agreables et funestes.

Atys dormant. Le Sommeil, Morphée, Phobetor, Phantase, Les Songes agreables. Les Songes funestes.

LE SOMMEIL.
Dormons, dormons tous;
Ah que le repos est doux!

MORPHÉE
Regnez, divin Sommeil, régnés sur tout le monde,
Répandés vos pavots les plus assoupissans;
Calmés les soins, charmés les sens,
Retenés tous les coeurs dans une paix profonde.

PHOBETOR
Ne vous faites point violence,
Coulés, murmurez, clairs ruisseaux,
Il n'est permis qu'au bruit des eaux
De troubler la douceur d'un si charmant silence.

LE SOMMEIL, MORPHÉE, PHOBETOR ET PHANTASE
Dormons, dormons tous,
Ah que le repos est doux!

Les Songes agreables aprochent d'Atys, et par leurs chants et par leurs dances, lui font connoître l'amour de Cybele, et le bonheur qu'il en doit esperer.

MORPHÉE
Escoute, écoute Atys la gloire qui t'appelle,
Sois sensible à l'honneur d'être aimé de Cybele,
Joüis heureux Atys de ta felicité.

MORPHÉE, PHOBETOR ET PHANTASE
Mais souviens-toi que la Beauté,
Quand elle est immortelle,
Demande la fidelité
D'une amour éternelle.

PHANTASE
Que l'Amour a d'attraits
Lors qu'il commence
A faire sentir sa puissance!
Que l'Amour a d'attraits
Lors qu'il commence
Pour ne finir jamais.

Trop heureux un Amant
Qu'Amour exemte
Des peines d'une longue attente!
Trop heureux un Amant
Qu'Amour exemte
De crainte et de tourment!

PHOBETOR
Goûte en paix chaque jour une douceur nouvelle,
Partage l'heureux sort d'une Divinité,
Ne vante plus la liberté,
Il n'en est point du prix d'une chaîne si belle.

MORPHÉE, PHOBETOR ET PHANTASE
Mais souviens-toi que la Beauté,
Quand elle est immortelle,
Demande la fidelité
D'une amour éternelle.

PHANTASE
Que l'Amour a d'attraits
Lors qu'il commence
A faire sentir sa puissance!
Que l'Amour a d'attraits
Lors qu'il commence
Pour ne finir jamais.

Les Songes funestes approchent d'Atys, et le menacent de la vengeance de Cybele s'il méprise son amour, et s'il ne l'aime pas avec fidélité.


Un Songe funestes.

Garde-toi d'offencer un amour glorieux,
C'est pour toi que Cibele abandonne les Cieux,
Ne trahis point son esperance.
Il n'est point pour les Dieux de mépris innocent,
Ils sont jaloux des coeurs, ils aiment la vengeance,
Il est dangereux qu'on offence
Un amour tout-puissant.

CHOEUR DES SONGES FUNESTES
L'amour qu'on outrage
Se transforme en rage,
Et ne pardonne pas
Aux plus charmans appas.
Si tu n'aime point Cybele
D'une amour fidelle,
Malheureux que tu souffriras!
Tu periras:
Crains une vengeance cruelle,
Tremble, crains un affreux trépas.

Atys épouventé par les Songes funestes, se réveille en sursault, le Sommeil et les Songes disparoissent avec l'Antre où ils étoient, et Atys se retrouve dans le même Palais où il s'étoit endormi.



Scene V.


Atys, Cybele, Melisse.

ATYS
Venez à mon secours, ô Dieux! ô justes Dieux!

CYBELE
Atys ne craignés rien, Cybele est en ces lieux.

ATYS
Pardonnés au desordre où mon coeur s'abandonne;
C'est un songe ...

CYBELE
Parlez, quel songe vous étonne?
Expliqués-moi votre embaras.

ATYS
Les songes sont trompeurs, et je ne les croi pas,
Les plaisirs et les peines
Dont en dormant on est séduit,
Sont des chimeres vaines
Que le réveil détruit.

CYBELE
Ne méprisez pas tant les songes
L'Amour peut emprunter leur voix,
S'ils font souvent des mensonges,
Ils disent vrai quelquefois.
Ils parloient par mon ordre, et vous les devez croire

ATYS
O Ciel!

CYBELE
N'en doutés point, connoisses votre gloire.
Répondés avec liberté,
Je vous demande un coeur qui dépend de lui-même.

ATYS
Une grande divinité
Doit s'assurer toujours de mon respect extrême.

CYBELE
Les Dieux dans leur grandeur suprême
Reçoivent tant d'honneurs qu'ils en sont rebutés.
Ils se lassent souvent d'être trop respectés,
Ils sont plus contens qu'on les aime.

ATYS
Je sçai trop ce que je vous doi
Pour manquer de reconnoissance ....



Scene VI.


Sangaride, Cybele, Atys, Melisse.

SANGARIDE se settant aux pieds de Cybele.
J'ai recours à votre puissance,
Reine des Dieux, protegés-moi.
L'interêt d'Atys vous en presse .....

ATYS interrompant Sangaride.
Je parlerai pour vous, que votre crainte cesse.

SANGARIDE
Tous deux unis des plus beaux noeuds ....

ATYS interrompant Sangaride.
Le sang et l'amitié nous unissent tous deux.
Que votre secours la délivre,
Des loix d'un hymen rigoureux,
Ce sont les plus doux de ses voeux
De pouvoir à jamais vous servir et vous suivre.

CYBELE
Les Dieux sont les Protecteurs
De la liberté des coeurs.
Allez ne craignez point le Roi ni sa colere,
J'aurai soin d'appaiser
Le Fleuve Sangar votre Pere;
Atys veut vous favoriser,
Cybele en sa faveur ne peut rien refuser.

ATYS
Ah! ç'en est trop ...

CYBELE
Non, non, il n'est pas necessaire
Que vous cachiez votre bonheur,
Je ne prétens point faire
Un vain Mystere
D'un amour qui vous fait honneur.
Ce n'est point à Cybele à craindre d'en trop dire.
Il est vrai, j'aime Atys, pour lui j'ai tout quitté,
Sans lui je ne veux plus de grandeur ni d'Empire,
Pour ma felicité
Son coeur seul peut suffire.
Allez, Atys lui-même ira vous garantir
De la fatale violence
Où vous ne pouvés consentir.

Sangaride se retire.

CYBELE parle à Atys.
Laissez nous, attendez mes ordres pour partir,
Je prétens vous armer de ma toute-puissance.


Scene VII.


Cybele, Melisse.

CYBELE
Qu'Atys dans ses respects mêle d'indifference!
L'ingrat Atys ne m'aime pas;
L'Amour veut de l'amour, tout autre prix l'offence;
Et souvent le respect et la reconnoissance
Sont l'excuse des coeurs ingrats.

MELISSE
Ce n'est pas un si grand crime
De ne s'exprimer pas bien,
Un coeur qui n'aima jamais rien
Sait peu comment l'amour s'exprime.

CYBELE
Sangaride est aimable, Atys peut tout charmer,
Ils témoignent trop s'estimér,
Et de simples parens sont moins d'intelligence;
Ils se sont aimez dés l'enfance,
Ils pourroient enfin trop s'aimer.
Je crains une amitié que tant d'ardeur anime.
Rien n'est si trompeur que l'estime:
C'est un nom supposé
Qu'on donne quelquefois à l'amour déguisé.
Je prétens m'éclaircir, leur feinte sera vaine.

MELISSE
Quels secrets par les Dieux ne sont point pénétrez?
Deux coeurs à feindre préparez
Ont beau cacher leur chaîne,
On abuse avec peine
Les Dieux par l'Amour éclairez.
Va, Melisse, donne ordre à l'aimable Zephire
D'accomplir promptement tout ce qu'Atys desire.



Scene VIII.

CYBELE seule.
Espoir si cher et si doux,
Ah! pourquoi me trompés-vous?
Des suprêmes grandeurs vous m'avez fait descendre,
Mille coeurs m'adoroient, je les néglige tous,
Je n'en demande qu'un, il a peine à se rendre;
Je ne sens que chagrins et que soupçons jaloux;
Est-ce le sort charmant que je devois attendre?
Espoir si cher, et si doux,
Ah! pourquoi me trompés-vous?
Helas! par tant d'attraits falloit-il me surprendre?
Heureuse si toujours j'avois pû me défendre!
L'Amour qui me flattoit me cachoit son courroux:
C'est donc pour me frapper des plus funestes coups,
Que le cruel Amour m'a fait un coeur si tendre?
Espoir si cher, et si doux,
Ah! pourquoi me trompez-vous.

Fin du troisième Acte.


最終更新:2014年05月03日 02:24