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ACTE PREMIER

(L'extrémité d'une des galeries latérales entourant le couvent de Saint-Jacques de Compostelle.
A droite on aperçoit, à travers la colonnade de la galerie, les arbres et les tombes du cloître.)


SCÈNE PREMIÈRE
(Les Religieux traversent la galerie pour se rendre dans la chapelle;
Fernand, sous la robe de novice, et Balthazar, le supérieur, paraissent les derniers.)

▼CHOEUR DES RELIGIEUX▲
Pieux monastère,
de ton sanctuaire
que notre prière
monte vers les cieux!
Dans cette chapelle,
guidé par ton zèle,
pèlerin fidèle,
viens offrir tes voeux.
Frères, allons prier; la cloche nous appelle.

(Les moines entrent dans la chapelle: Balthazar va les suivre mais il aperçoit Fernand qui reste immobile absorbé dans ses pensées. Il s'approche de lui.)


SCÈNE DEUXIÈME
(Balthazar et Fernand.)

▼BALTHAZAR▲
Ne vas-tu pas prier avec eux?

▼FERNAND▲
Je ne puis.

▼BALTHAZAR▲
Aurais-je de ton cour deviné les ennuis?…
Dieu ne te suffit plus.

▼FERNAND▲
Vous dites vrai, mon père;
quand je vais par des voeux m'enchaîner sans retour,
je jette malgré moi vers les biens de la terre
un regard de douleur, de regrets et d'amour.

▼BALTHAZAR▲
Parle, achève…

▼FERNAND▲
A l'autel que saint Jacques protège
et que de pèlerins un peuple immense assiège,
Je priais… j'invoquais le anges radieux.
Quand l'un d'eux tout à coup vint s'offrir à mes yeux
Un ange, une femme inconnue,
à genoux, priait près de moi,
et je me sentais à sa vue
frémir de plaisir et d'effroi.
Ah! Mon père! Qu'elle était belle!
Et contre mon cour sans secours
c'est Dieu que j'implore… et c'est elle,
c'est elle!… que je vois toujours.
Depuis qu'en lui donnant l'eau sainte,
ma main a rencontré sa main,
de ces murs franchissant l'enceinte,
mon cour rêve un autre destin.
A tous mes serments infidèle,
et du ciel cherchant le secours,
c'est Dieu que je prie, et c'est elle
qu'en mon cour je trouve toujours.

▼BALTHAZAR▲
Toi, mon fils, ma seule espérance,
l'honneur, le soutien de la foi…
toi qui devais à ma puissance
bientôt succéder après moi!

▼FERNAND▲
(baissant la tête)
Mon père… je l'aime.

▼BALTHAZAR▲
(avec douleur)
Aimer!… Toi!…
sais-tu que devant la tiare
s'abaisse le sceptre des rois?
Que ma main unit ou sépare? Que l'Espagne tremble à ma voix?

▼FERNAND▲
Mon père, je l'aime.

▼BALTHAZAR▲
Et tu crois
au bonheur que promet une terrestre flamme!
Dis, sais-tu quelle est cette femme
Qui triomphe de ta vertu?
Celle à qui tu donnes ton âme…
Son nom, son rang… les connais-tu?

▼FERNAND▲
(avec passion)
Non… mais je l'aime.

▼BALTHAZAR▲
(levant les mains au ciel)
O ciel! Perdu!
Va-t'en, insensé, téméraire!
Va loin de nous porter tes pas,
et que Dieu, plus que moi sévère,
que Dieu ne te maudisse pas!

▼FERNAND▲
Idole si douce et si chère,
ô toi qui vois tous mes combats,
ô toi! Mon seul bien sur la terre,
veille sur moi, guide mes pas.

▼BALTHAZAR▲
(Balthazar arrête par la main Fernand, prêt à sortir, et lui dit avec émotion)
La trahison, la perfidie,
ô mon fils, vont flétrir tes jours;
parmi les écueils de la vie,
comprends les dangers que tu cours!
Peut-être, brisé par l'orage,
tu voudras, pauvre naufragé,
regagner en vain le rivage
et le port qui t'ont protégé.

▼FERNAND▲
(tombant à genoux)
Bénissez-moi, mon père,
Je pars.

▼BALTHAZAR▲
Va-t'en, insensé, téméraire!
Vers nous bientôt tu reviendras.
Dans sa justice ou sa colère,
que Dieu ne te maudisse pas!

▼FERNAND▲
Idole si douce et si chère!
O toi qui vois tous mes combats,
sois mon seul bien sur cette terre!
Je pars, je pars, guide mes pas.

(Fernand sort par la grille du fond, et, de loin, tend les bras à Balthazar, qui détourne la tête en essuyant une larme, et entre dans la chapelle.)
 

SCÈNE TROISIÈME
(Inez et Jeunes filles.)

▼LES JEUNES FILLES▲
Rayons dorés, tiède zéphyre,
de fleurs parez ce doux séjour,
heureux rivage qui respire
la paix, le plaisir et l'amour.

▼INEZ▲
Nous que protège sa tendresse,
esclaves, par nos soins discrets,
de notre belle maîtresse
sachons payer les bienfaits.
Silence! Silence!
La mer est belle et l'air est doux.
C'est la nacelle qui s'avance;
voyez, là-bas… la voyez-vous?

(Les Jeunes filles s'approchent du rivage et regardent dans le lointain.)

INEZ et LES JEUNES FILLES
Doux zéphyr, sois lui fidèle,
pour conduire sa nacelle
aux bords où l'amour l'appelle,
à la voile sois léger;
et ravis sur ton passage,
pour embaumer cette plage,
le parfum qui se dégage
du jasmin, de l'oranger.


SCÈNE QUATRIÈME
(Les mêmes; Fernand, paraissant sur une barque, entouré de jeunes filles, et portant sur les yeux un voile qu'on lui enlève.)

▼FERNAND▲
(à la jeune fille qui l'aide à descendre de la barque)
Gentille messagère et nymphe si discrète,
qui chaque jour protégez dans ces lieux
mon arrivée ou ma retraite,
pourquoi voiler ainsi mes yeux?
(les jeunes filles détournent la tête et font signe qu'elles ne peuvent répondre)
Toujours même silence!
(s'approchant d'Inez)
Et pourquoi, je t'en prie,
ta maîtresse si jolie
persiste-t-elle à me cacher son rang, son nom? Quels sont-ils?

▼INEZ▲
(souriant)
Impossible
de le savoir.

▼FERNAND▲
Je ne puis t'arracher
ce secret; il est donc terrible?

▼INEZ▲
C'est celui de la señora.
Je l'aperçois, elle vous répondra.

(Léonor entre et fait signe aux jeunes filles de s'éloigner.)


SCÈNE CINQUIÈME
(Fernand et Léonor.)

▼LÉONOR▲
Mon idole! Dieu t'envoie.
Viens, ah! Viens, que je te voie!
Ta présence fait ma joie
et d'ivresse emplit mon cour.

▼FERNAND▲
Pour toi des saints autels j'ai brisé l'esclavage.

▼LÉONOR▲
Et depuis lors mon pouvoir protecteur
veilla sur tes destins, et sur ce doux rivage
conduisit en secret tes pas…

▼FERNAND▲
Pour mon bonheur!

▼LÉONOR▲
Pour ta perte peut-être!

▼FERNAND▲
Par pitié, fais-moi connaître
quel péril pour nous peut naître;
de ton cour si je suis maître,
quel malheur craindre ici-bas?

▼LÉONOR▲
Ah! De mon sort que ne suis-je maîtresse!

▼FERNAND▲
Qui donc es-tu?

▼LÉONOR▲
Ne le demande pas.

▼FERNAND▲
J'obéis… Mais un mot, un seul!… Si ta tendresse
à la mienne répond, partage mon destin
et du pauvre Fernand daigne accepter la main.

▼LÉONOR▲
Je le voudrais… Je ne le puis!

▼FERNAND▲
Qu'entends-je,
O destinée étrange!
O sort plein de rigueur!

▼LÉONOR▲
(à part)
C'est Dieu… Dieu qui se venge
et qui brise mon cour.
(à Fernand, lui montrant un parchemin)
Songeant à toi plus qu'à moi-même,
chaque jour je voulais te donner cet écrit…
J'hésitais chaque jour…

▼FERNAND▲
Pourquoi?

▼LÉONOR▲
N'as-tu pas dit
que pour ton cour l'honneur était le bien suprême?

▼FERNAND▲
Je l'ai dit.

▼LÉONOR▲
J'assurais par là ton avenir…
Mais il t'ordonne…

▼FERNAND▲
Eh! Quoi donc?

▼LÉONOR▲
De me fuir.

▼FERNAND▲
Jamais!

▼LÉONOR▲
Il faut m'oublier et partir.

▼FERNAND▲
Que moi je t'oublie!
Ne plus te revoir!
T'aimer, c'est ma vie;
sans toi plus d'espoir
mon cour, qui se brise,
sera froid, mon Dieu!
Avant qu'il te dise
ce fatal adieu.
Maudit sur la terre,
hélas! Sous quels cieux
traîner ma misère?
Où puis-je être heureux?

▼LÉONOR▲
Adieu! Pars! Oublie
ton rêve et nos voeux;
l'amour qui nous lie
nous perdrait tous deux.
Mon âme, qui saigne
de mille douleurs,
se brise et dédaigne
la plainte et les pleurs.
Adieu sur la terre!
Et si jusqu'aux cieux
parvient ma prière,
tu dois être heureux!


SCÈNE SIXIÈME
(Les mêmes; Inez.)

▼INEZ▲
(accourant toute tremblante)
Ah! madame, madame.

▼LÉONOR▲
Qu'est-ce donc?

▼INEZ▲
C'est le roi!

▼LÉONOR▲
O! Ciel!

▼FERNAND▲
(surpris)
Le roi!

▼LÉONOR▲
(à part)
J'ai tressailli d'effroi
jusqu'au fond de mon âme!
(à Inez)
Je te suis.
(à Fernand, lui remettant le parchemin qu'elle lui a montré)
Tiens, lis,
et surtout obéis.
Adieu! Pars, oublie
ton rêve et nos voeux;
l'amour qui nous lie
nous perdrait tous deux.
Mon âme, qui saigne
de mille douleurs,
se brise et dédaigne
la plainte et les pleurs.
Adieu sur la terre!
Et si jusqu'aux cieux
parvient ma prière,
tu dois être heureux!

▼FERNAND▲
Que moi je t'oublie!
Ne plus te revoir!
T'aimer c'est ma vie;
sans toi plus d'espoir.
Mon cour, qui se brise,
sera froid, mon Dieu!
Avant qu'il te dise
ce fatal adieu.
Maudit sur la terre,
hélas! Sous quels cieux
traîner ma misère?
où puis-je être heureux?

(Léonor jette à Fernand un dernier adieu, puis sort avec précipitation.)


SCÈNE SEPTIÈME
(Fernand et Inez.)

 FERNAND
(qui a retenu Inez, prête à suivre Léonor)
Celui qui vient la chercher…

▼INEZ▲
Oh! Silence!
C'est le roi!

▼FERNAND▲
Je sais tout: son rang, sa naissance,
la rapprochent du trône… et moi!
Moi, malheureux, obscur et sans gloire…

▼INEZ▲
Prudence!

(elle lui fait signe de se taire et s'enfuit.)


SCÈNE HUITIÈME
(Fernand.)

▼FERNAND▲
(seul)
Je ne méritais pas son amour et son cour.
(il regarde le parchemin que Léonor lui a remis, et pousse un cri de joie)
O ciel! Elle veut donc que j'en devienne digne!
Oui… ce titre, ce rang et cet honneur insigne!…
Moi… Fernand! Capitaine! Et par elle, ô bonheur!
Oui, ta voix m'inspire,
et sous ton empire,
un double délire
m'exalte en ce jour;
à toi je me livre,
l'espoir va me suivre,
et mon cour s'enivre
de gloire et d'amour.
Adieu donc, doux rivage,
témoin de mon bonheur!
Bientôt sous votre ombrage
je reviendrai vainqueur.
Oui, ta voix m'inspire,
et sous ton empire,
un double délire
m'exalte en ce jour;
à toi je me livre,
l'espoir va me suivre,
et mon cour s'enivre
de gloire et d'amour.

ACTE PREMIER

L'extrémité d'une des galeries latérales entourant le couvent de Saint-Jacques de Compostelle.
A droite on aperçoit, à travers la colonnade de la galerie, les arbres et les tombes du cloître.


SCÈNE PREMIÈRE
Les Religieux traversent la galerie pour se rendre dans la chapelle;
Fernand, sous la robe de novice, et Balthazar, le supérieur, paraissent les derniers.

CHOEUR DES RELIGIEUX
Pieux monastère,
de ton sanctuaire
que notre prière
monte vers les cieux!
Dans cette chapelle,
guidé par ton zèle,
pèlerin fidèle,
viens offrir tes voeux.
Frères, allons prier; la cloche nous appelle.

Les moines entrent dans la chapelle: Balthazar va les suivre mais il aperçoit Fernand qui reste immobile absorbé dans ses pensées. Il s'approche de lui.


SCÈNE DEUXIÈME
Balthazar et Fernand.

BALTHAZAR
Ne vas-tu pas prier avec eux?

FERNAND
Je ne puis.

BALTHAZAR
Aurais-je de ton cour deviné les ennuis?…
Dieu ne te suffit plus.

FERNAND
Vous dites vrai, mon père;
quand je vais par des voeux m'enchaîner sans retour,
je jette malgré moi vers les biens de la terre
un regard de douleur, de regrets et d'amour.

BALTHAZAR
Parle, achève…

FERNAND
A l'autel que saint Jacques protège
et que de pèlerins un peuple immense assiège,
Je priais… j'invoquais le anges radieux.
Quand l'un d'eux tout à coup vint s'offrir à mes yeux
Un ange, une femme inconnue,
à genoux, priait près de moi,
et je me sentais à sa vue
frémir de plaisir et d'effroi.
Ah! Mon père! Qu'elle était belle!
Et contre mon cour sans secours
c'est Dieu que j'implore… et c'est elle,
c'est elle!… que je vois toujours.
Depuis qu'en lui donnant l'eau sainte,
ma main a rencontré sa main,
de ces murs franchissant l'enceinte,
mon cour rêve un autre destin.
A tous mes serments infidèle,
et du ciel cherchant le secours,
c'est Dieu que je prie, et c'est elle
qu'en mon cour je trouve toujours.

BALTHAZAR
Toi, mon fils, ma seule espérance,
l'honneur, le soutien de la foi…
toi qui devais à ma puissance
bientôt succéder après moi!

FERNAND
baissant la tête
Mon père… je l'aime.

BALTHAZAR
avec douleur
Aimer!… Toi!…
sais-tu que devant la tiare
s'abaisse le sceptre des rois?
Que ma main unit ou sépare? Que l'Espagne tremble à ma voix?

FERNAND
Mon père, je l'aime.

BALTHAZAR
Et tu crois
au bonheur que promet une terrestre flamme!
Dis, sais-tu quelle est cette femme
Qui triomphe de ta vertu?
Celle à qui tu donnes ton âme…
Son nom, son rang… les connais-tu?

FERNAND
avec passion
Non… mais je l'aime.

BALTHAZAR
levant les mains au ciel
O ciel! Perdu!
Va-t'en, insensé, téméraire!
Va loin de nous porter tes pas,
et que Dieu, plus que moi sévère,
que Dieu ne te maudisse pas!

FERNAND
Idole si douce et si chère,
ô toi qui vois tous mes combats,
ô toi! Mon seul bien sur la terre,
veille sur moi, guide mes pas.

BALTHAZAR
Balthazar arrête par la main Fernand, prêt à sortir, et lui dit avec émotion
La trahison, la perfidie,
ô mon fils, vont flétrir tes jours;
parmi les écueils de la vie,
comprends les dangers que tu cours!
Peut-être, brisé par l'orage,
tu voudras, pauvre naufragé,
regagner en vain le rivage
et le port qui t'ont protégé.

FERNAND
tombant à genoux
Bénissez-moi, mon père,
Je pars.

BALTHAZAR
Va-t'en, insensé, téméraire!
Vers nous bientôt tu reviendras.
Dans sa justice ou sa colère,
que Dieu ne te maudisse pas!

FERNAND
Idole si douce et si chère!
O toi qui vois tous mes combats,
sois mon seul bien sur cette terre!
Je pars, je pars, guide mes pas.

Fernand sort par la grille du fond, et, de loin, tend les bras à Balthazar, qui détourne la tête en essuyant une larme, et entre dans la chapelle.
 

SCÈNE TROISIÈME
Inez et Jeunes filles.

LES JEUNES FILLES
Rayons dorés, tiède zéphyre,
de fleurs parez ce doux séjour,
heureux rivage qui respire
la paix, le plaisir et l'amour.

INEZ
Nous que protège sa tendresse,
esclaves, par nos soins discrets,
de notre belle maîtresse
sachons payer les bienfaits.
Silence! Silence!
La mer est belle et l'air est doux.
C'est la nacelle qui s'avance;
voyez, là-bas… la voyez-vous?

Les Jeunes filles s'approchent du rivage et regardent dans le lointain.

INEZ et LES JEUNES FILLES
Doux zéphyr, sois lui fidèle,
pour conduire sa nacelle
aux bords où l'amour l'appelle,
à la voile sois léger;
et ravis sur ton passage,
pour embaumer cette plage,
le parfum qui se dégage
du jasmin, de l'oranger.


SCÈNE QUATRIÈME
Les mêmes; Fernand, paraissant sur une barque, entouré de jeunes filles, et portant sur les yeux un voile qu'on lui enlève.

FERNAND
à la jeune fille qui l'aide à descendre de la barque
Gentille messagère et nymphe si discrète,
qui chaque jour protégez dans ces lieux
mon arrivée ou ma retraite,
pourquoi voiler ainsi mes yeux?
les jeunes filles détournent la tête et font signe qu'elles ne peuvent répondre
Toujours même silence!
s'approchant d'Inez
Et pourquoi, je t'en prie,
ta maîtresse si jolie
persiste-t-elle à me cacher son rang, son nom? Quels sont-ils?

INEZ
souriant
Impossible
de le savoir.

FERNAND
Je ne puis t'arracher
ce secret; il est donc terrible?

INEZ
C'est celui de la señora.
Je l'aperçois, elle vous répondra.

Léonor entre et fait signe aux jeunes filles de s'éloigner.


SCÈNE CINQUIÈME
Fernand et Léonor.

LÉONOR
Mon idole! Dieu t'envoie.
Viens, ah! Viens, que je te voie!
Ta présence fait ma joie
et d'ivresse emplit mon cour.

FERNAND
Pour toi des saints autels j'ai brisé l'esclavage.

LÉONOR
Et depuis lors mon pouvoir protecteur
veilla sur tes destins, et sur ce doux rivage
conduisit en secret tes pas…

FERNAND
Pour mon bonheur!

LÉONOR
Pour ta perte peut-être!

FERNAND
Par pitié, fais-moi connaître
quel péril pour nous peut naître;
de ton cour si je suis maître,
quel malheur craindre ici-bas?

LÉONOR
Ah! De mon sort que ne suis-je maîtresse!

FERNAND
Qui donc es-tu?

LÉONOR
Ne le demande pas.

FERNAND
J'obéis… Mais un mot, un seul!… Si ta tendresse
à la mienne répond, partage mon destin
et du pauvre Fernand daigne accepter la main.

LÉONOR
Je le voudrais… Je ne le puis!

FERNAND
Qu'entends-je,
O destinée étrange!
O sort plein de rigueur!

LÉONOR
à part
C'est Dieu… Dieu qui se venge
et qui brise mon cour.
à Fernand, lui montrant un parchemin
Songeant à toi plus qu'à moi-même,
chaque jour je voulais te donner cet écrit…
J'hésitais chaque jour…

FERNAND
Pourquoi?

LÉONOR
N'as-tu pas dit
que pour ton cour l'honneur était le bien suprême?

FERNAND
Je l'ai dit.

LÉONOR
J'assurais par là ton avenir…
Mais il t'ordonne…

FERNAND
Eh! Quoi donc?

LÉONOR
De me fuir.

FERNAND
Jamais!

LÉONOR
Il faut m'oublier et partir.

FERNAND
Que moi je t'oublie!
Ne plus te revoir!
T'aimer, c'est ma vie;
sans toi plus d'espoir
mon cour, qui se brise,
sera froid, mon Dieu!
Avant qu'il te dise
ce fatal adieu.
Maudit sur la terre,
hélas! Sous quels cieux
traîner ma misère?
Où puis-je être heureux?

LÉONOR
Adieu! Pars! Oublie
ton rêve et nos voeux;
l'amour qui nous lie
nous perdrait tous deux.
Mon âme, qui saigne
de mille douleurs,
se brise et dédaigne
la plainte et les pleurs.
Adieu sur la terre!
Et si jusqu'aux cieux
parvient ma prière,
tu dois être heureux!


SCÈNE SIXIÈME
Les mêmes; Inez.

INEZ
accourant toute tremblante
Ah! madame, madame.

LÉONOR
Qu'est-ce donc?

INEZ
C'est le roi!

LÉONOR
O! Ciel!

FERNAND
surpris
Le roi!

LÉONOR
à part
J'ai tressailli d'effroi
jusqu'au fond de mon âme!
à Inez
Je te suis.
à Fernand, lui remettant le parchemin qu'elle lui a montré
Tiens, lis,
et surtout obéis.
Adieu! Pars, oublie
ton rêve et nos voeux;
l'amour qui nous lie
nous perdrait tous deux.
Mon âme, qui saigne
de mille douleurs,
se brise et dédaigne
la plainte et les pleurs.
Adieu sur la terre!
Et si jusqu'aux cieux
parvient ma prière,
tu dois être heureux!

FERNAND
Que moi je t'oublie!
Ne plus te revoir!
T'aimer c'est ma vie;
sans toi plus d'espoir.
Mon cour, qui se brise,
sera froid, mon Dieu!
Avant qu'il te dise
ce fatal adieu.
Maudit sur la terre,
hélas! Sous quels cieux
traîner ma misère?
où puis-je être heureux?

Léonor jette à Fernand un dernier adieu, puis sort avec précipitation.


SCÈNE SEPTIÈME
Fernand et Inez.

 FERNAND
qui a retenu Inez, prête à suivre Léonor
Celui qui vient la chercher…

INEZ
Oh! Silence!
C'est le roi!

FERNAND
Je sais tout: son rang, sa naissance,
la rapprochent du trône… et moi!
Moi, malheureux, obscur et sans gloire…

INEZ
Prudence!

elle lui fait signe de se taire et s'enfuit.


SCÈNE HUITIÈME
Fernand.

FERNAND
seul
Je ne méritais pas son amour et son cour.
il regarde le parchemin que Léonor lui a remis, et pousse un cri de joie
O ciel! Elle veut donc que j'en devienne digne!
Oui… ce titre, ce rang et cet honneur insigne!…
Moi… Fernand! Capitaine! Et par elle, ô bonheur!
Oui, ta voix m'inspire,
et sous ton empire,
un double délire
m'exalte en ce jour;
à toi je me livre,
l'espoir va me suivre,
et mon cour s'enivre
de gloire et d'amour.
Adieu donc, doux rivage,
témoin de mon bonheur!
Bientôt sous votre ombrage
je reviendrai vainqueur.
Oui, ta voix m'inspire,
et sous ton empire,
un double délire
m'exalte en ce jour;
à toi je me livre,
l'espoir va me suivre,
et mon cour s'enivre
de gloire et d'amour.
最終更新:2015年01月29日 20:47