ACTE V


Premier Tableau

(Le théâtre représente un caveau voûté dans le palais de Munster. A gauche un escalier par lequel on descend dans le caveau. Au fond, au milieu du mur, une dalle saillante sur laquelle des caractères sont tracés, A droite une porte de fer donnât sur la campagne. Zacharie, Mathisen, Jonas sont tous debout)

▼MATHISEN▲
(s'adressant à Jonas)
Ainsi vous l'attestez?

▼ZACHARIE▲
Oui, redoublant d'efforts,
vers Munster l'Empereur
et s'avance et s'apprête
a foudroyer ces murs!

▼MATHISEN▲
Comment fuir la tempête!

▼ZACHARIE▲
(tirant un parchemin de sa poche)
Il offre sauvegarde â nous,
a nos trésors,
si nous lui livrons le Prophète.
Qu'en dites vous?

(Tous les trois se regardent un instant sans répondre, puis croisent les bras sur la poitrine et parlent en baissant la tête.)

▼LES TROIS ANABAPTISTES▲
Du ciel la volonté soit faite!

(Ils sortent. Apparaissent sur les marches de l'escalier à gauche plusieurs soldats. L'un tient un flambeau, les autres entraînent Fidès. Les soldats montrent à Fidès un banc de pierre, lui font signe de s'asseoir et remontent l'escalier par où ils partent.)

▼FIDÈS▲
O prêtes de Baal,
Où m'avez-vous conduit?
Quoi! Les murs d'un cachot!
Ah! L'on retient mes pas
quand de mon fils
Berthe veut le trépas
mon fils! il n'est plus!
Il renia de sa mère
que sur son front coupable
éclate ta colère,
frappe, frappe, toi qui punis
tous les enfants ingrats!
Non, non, non, grâce,
grâce pour lui!

O toi qui m'abandonnes,
mon cœur, mon cœur est désarmé,
est désarmé;
ta mère te pardonne,

(pleurant)

Adieu, adieu, adieu, adieu!
Mon pauvre enfant!
Mon bien-aimé soit pardonné!
Sois pardonné!
Je t'ai donné mon cœur,
je t'ai donné mes vœux,
et maintenant, maintenant
pour que tu sois heureux,
pour que tu sois heureux,
je te donne ma vie,
et mon âme ravie
t'attendra dans les cieux!
Ah! O toi qui m'abandonnes, etc.

(Un officier arrive, descendent par l'escalier.)

▼UN OFFICIER▲
Femme, prosterne-toi,
prosterne-toi devant ton divin maître!
Le Roi Prophète à tes yeux va paraître!

(il sort)

▼FIDÈS▲
(d'une voix suffoquée par l'émotion)
Il va venir!… Je le vais à voir!…¡Hélas!
Bien coupable peut-être! Dieu! Dieu!

(avec exaltation)

Comme un éclair se précipité
dans son âme,
frappe mon fils, ô vérité,
de ta flamme!
Frappe mon fils, etc.
Qu'il soit dompté
comme l'airain par le feu!
Ah! comme un éclair, etc.
Céleste flamme,
touche enfin son âme!
Sainte phalange,
rends-lui son ange,
esprit divin, descend vainqueur,
descend, descend vainqueur
sainte phalange, etc.
De tes rayons perce son cœur,
son cœur;
et de crime, sous ses pas,
l'abîme noir ne s'ouvre pas!
Comme un éclair!
Je ramène mon enfant,
mon enfant au Dieu sauveur,
au Dieu sauveur!

(Jean entre habillé comme au quatrième acte, mais enveloppé d'un manteau et la couronne sur la tête. Il faut un signe à l'officier, qui s'éloigne. Il descend l'escalier et court vers sa mère.)

▼JEAN▲
Ma mère! Ma mère! Ma mère!

▼FIDÈS▲
(ave un ton sévère et solennel)
Arrière! Prophète et fils de Dieu,
tu n'est plus dans ce temple,
où debout tu m'osais braver!
Et maintenant que Dieu seul nos contemple,
a genoux, à genoux!

▼JEAN▲
Ah! pardon pour fils égaré!

▼FIDÈS▲
Mon fils! je n'en ai pas!
Ce fils tan pleuré…

▼JEAN▲
De honte je rougis!

▼FIDÈS▲
…était pur, pur devant Dieu!
Mais toi! mais toi!
Mais toi! mais toi!
Mais toi, mais toi qu'on déteste,
tyran, sous la colère céleste,
tremblant, toi dont les mains
sont teintes du sang,
va t'en, va t'en,
tu n'es plus rien pour moi! Va t'en!
Va t'en! Tu n'es plus rien pour moi!
Loin de mon cœur, loin de mes yeux,
loin de mon cœur et de mes yeux,
du sang! Du sang! Ah! Va t'en!
Du sang! Ah! Va t'en, etc.

▼JEAN▲
Ma mère, hélas!
Me maudit, me déteste,
quand j'allais la presser dans mes bras,
et son courroux est le courroux céleste!
Hélas! Autour de moi
cachez ces flots de sang!
Image horrible, éloigne-toi, va t'en,
Ah! de mon cœur éloigne-toi, va t'en
remords vengeur, éloigne-toi, va t'en.

▼FIDÈS▲
Va t'en! tyran! Va t'en!
Tu n'es plus rien pour moi!

▼JEAN▲
Ah! c'est mon seul amour
qui m'a rendu coupable,
je ne voulais d'abord, en ma juste fureur,
que venger de Berthe le trépas et l'honneur,
et puis le sang versé
vous rend impitoyable,
ces maîtres insensés.
Ces tyrans orgueilleux,
j'ai voulu les punir!

▼FIDÈS▲
Et tu les as surpassés!
Aucun d'eux n'eût osé,
faussaire et sacrilège,
se proclamer l'égal
de Dieu qui nos protège!
Mais toi, Prophète funeste, effrayant
sous le céleste courroux blasphémant,
loin de mon cœur et de mes yeux, etc.

▼JEAN▲
Hélas! hélas!
Ah! Dans mon cœur tout déchiré
quels remords affreux!
Ah! Pitié! Ah! Pitié! Pitié!
Remords vengeur, éloigne-toi, va t'en,
remords vengeur, etc.
Pitié de moi!

▼FIDÈS▲
Eh bien! Si le remords
s'éveille dans ton âme,
et si peux encore
être digne de moi,
renonce a ton pouvoir,
a ceux qui t'ont fait roi!

▼JEAN▲
Déserter mes soldats?

▼FIDÈS▲
C'est Dieu qui te réclame!

▼JEAN▲
Par eux je fus vainqueur!

▼FIDÈS▲
Par eux tu fus infâme!

▼JEAN▲
Ils diront que j'ai fui!

▼FIDÈS▲
Vers le ciel, vers l'honneur!

(Elle conduit Jean sur le devant du théâtre, lui montrant le ciel.)

A la voix de ta mère,
le ciel peut, le ciel peut se rouvrir!
Dieu n'a plus de colère
devant la repentir
le ciel peut se rouvrir!

▼JEAN▲
(répétant involontairement)
¡Peut se rouvrir!

▼FIDÈS▲
Oui, par lui, je l'atteste,
tous les crimes s'effaceront
et le pardon du ciel
descendra sur ton front!

▼JEAN▲
C'est sa voix qui me l'atteste,
et le pardon céleste
sur mon front!

▼FIDÈS▲
A la voix de ta mère,
le ciel peut se rouvrir, etc.
Ah! Les jours d'innocence
a ma voix renaîtront
et le pardon du ciel
descendra sur ton front!

▼JEAN▲
En moi quel combats!

▼FIDÈS▲
Viens, mon fils!

▼JEAN▲
Quoi! Se pourrait-il?

▼FIDÈS▲
Oui, mon fils!

▼JEAN▲
Quoi! ce nom?

▼FIDÈS▲
Ce nom si tendre…

▼JEAN▲
Votre cœur…

▼FIDÈS▲
Mon cœur est prêt…

▼JEAN▲
A me le rendre.

▼FIDÈS▲
A te le rendre.

▼JEAN▲
Pour toujours!

▼FIDÈS▲
Pour toujours!

▼JEAN▲
Mais mon crime?

▼FIDÈS▲
S'effacera!

▼JEAN▲
Le pardon?

▼FIDÈS▲
Descendra!

▼JEAN▲
Le ciel pourrait me pardonner?

▼FIDÈS▲
Viens à ta mère! Viens!
Mon fils!

▼JEAN▲
Ma mère!

(Elle ouvre les bras à son fils, qui s'y jette avec transport.)

▼FIDÈS▲
Mon fils!

▼JEAN▲
Ma mère!

▼FIDÈS▲
Ah! viens, il est temps,
il en est temps encore.
Entends ma voix fidèle,
entends ma voix fidèle,
sois courageux,
sois courageux, sois fort!
Le Dieu du ciel t'appelle à lui!
Ah! Viens, il en est temps,
il en est temps encore,
sois à l'honneur fidèle,
sois à l'honneur fidèle,
sois courageux,
sois courageux, sois fort!
Le Dieu du ciel t'appelle à lui!
Et bientôt du Seigneur
le pardon descendra!
Et bientôt le pardon céleste
descendra sur toi!

▼JEAN▲
Oui, je le veux,
il en est temps encore,
et trop longtemps rebelle,
et trop longtemps rebelle,
changeons enfin
changeons enfin mon sort!
Le Dieu du ciel m'appelle
et bientôt du Seigneur
le pardon descendra!
Et bientôt le pardon céleste
descendra sur moi!

(Berthe habillée du blanc et tenant un flambeau à la main, entre par la porte à droite qui donne sur la campagne. Elle s'avance vers le mur du fond et touche la dalle de pierre, que s'ouvre.)

▼BERTHE▲
Voici le souterrain…
Et la dalle de pierre!

▼JEAN▲
O ciel!

▼FIDÈS▲
(courant vers Berthe)
Berthe!

▼BERTHE▲
Fidès!

▼FIDÈS▲
Ici que viens-tu faire?

▼BERTHE▲
Par mon aïeul, gardien
du palais de Munster,
je savais les amas
de salpêtre, et der fer,
cachés dans ce caveau,

(montrant le flambeau qu'elle tient)

Cette flamme propice
peut en quelques instants
embraser l'édifice,
ce Prophète et les siens et moi-même,
et moi-même avec eux!

▼FIDÈS▲
(à Jean)
Que dit-elle?
Grand Dieu! mon fils!

▼BERTHE▲
(apercevant Jean)
Ah! qu'ai-je vu!
Toi, mon bien-aimé!
C'est toi que m'es rendu!

▼FIDÈS▲
Parlez bas, parlez bas!

▼BERTHE▲
Ah! combien ma douleur fut amère,
mon bien-aimé, mon bien-aimé,
que ma douleur fut amère!
Je t'ai cru tombé sous les coups
de ce Prophète sanguinaire,
ce monstre en horreur à la terre…

▼FIDÈS▲
O Berthe!

▼BERTHE▲
Ce monstre aux enfers destiné!

▼FIDÈS▲
Ah! que dis-tu!

▼JEAN▲
(à voix basse a sa mère)
Ah! de grâce, taisez-vous!
Pitié, pitié!
Ah! ne me trahissez pas!

▼FIDÈS▲
Ah! ne maudis personne!
J'ai retrouve mon fils;
la haine m'abandonne!
Allons! Partons!

▼BERTHE▲
Oui, partons!

▼LES TROIS▲
Loin de la ville, loin de la ville,
qu'un humble asile, qu'un humble asile,
comble nos vœux,
comble nos vœux, comble nos vœux!
Qu'un sort heureux, qu'un sort heureux,
comble nos vœux!
Qu'un sort tranquille,
comble, comble nos vœux!
Loin de la ville, etc.
Douce retraite, sombre et discrète,
qui nous permette de vivre heureux!
Allons, viens et partons
pour un humble séjour
pour un humble séjour
où nous vivrons heureux,
allons, partons, partons!

(Un officier suivi de plusieurs soldats, descend précipitamment l'escalier â gauche.)

▼UN OFFICIER▲
(à Jean)
On t'a trahi! Par ruse
en ce palais s'est glissé l'ennemi!

▼JEAN▲
L'ennemi!

▼UN OFFICIER▲
Ils veulent t'immoler
au milieu de la fête
de ton couronnement…
Viens les punir, Prophète!

▼BERTHE▲
(avec un cri d'épouvante)
Prophète! Prophète!

▼JEAN▲
Grâce!

▼BERTHE▲
Non!

▼FIDÈS▲
Grâce!

▼BERTHE▲
Non!

▼JEAN▲
Grâce!

▼BERTHE▲
Va! Va! Va!
O spectre, ô spectre épouvantable,
o terre, ô terre, entre ouvre-toi!
Fuis! Que ta main coupable
n'approche pas de moi!
Va! fuis loin de moi! Va!
Ton spectre fut un glaive,
tes droits son des forfaits,
et le sang qui s'élève
nous sépare pour jamais,
et le sang, etc.

▼FIDÈS▲
Viens, partons,
il faut nous presser!

▼JEAN▲
Non! je reste à présent!
A la mort, à la mort je me livre!
Berthe sait mes forfaits;
qu'ai-je besoin de vivre?
Berthe m'avait maudit,
Berthe m'avait maudit,
Dieu, oui, devait l'exaucer!
Tourment, tourment épouvantable!

▼BERTHE▲
Va! fuis!

▼FIDÈS▲
Tourment!

▼JEAN▲
O terre, ô terre, entrouvre-toi!
Plus de grâce au coupable,
plus de pitié pour moi,
plus de pitié, plus de pitié, ¡Ah!

▼FIDÈS▲
…affreux! grâce pour lui!
Pitié pour lui, pitié, ¡Ah!

▼BERTHE▲
Va! fuis!
N'approche pas!
Va! Fuis! ¡Ah!
Ton spectre fut un glaive, etc.

▼LES TROIS▲
Et le sang qui se élève
nous/les sépare à jamais,
et la sang, etc.

▼BERTHE▲
Je t'aimais…toi que je maudis,
je t'aime encore peut-être,
et m'en punis!

(Berthe se frappe d'un poignard et tombe dans les bras de Fidès)

▼FIDÈS, JEAN▲
Ah!

▼JEAN▲
Morte! Morte!

(Jean fait signe aux soldats d'emmener sa mère et Berthe, puis il reprend la couronne, qui était restée sur la table de pierre, et la remet sur son front.)

Veillez sur ma mère!
Moi! je reste en ces lieux
pour punir les coupables!

(Les soldats entraînent Fidès.)

▼FIDÈS▲
Mon fils! Mon fils! Mon fils! Mon fils!

(Silence, pendant lequel Jean regarde si Fidès et assez éloignée.)

▼JEAN▲
Et maintenant, vous qui m'avez perdu,
tous serez punis!

(Il remonte vivement l'escalier à gauche après avoir regardé le caveau que Berthe a montré au commencement de la scène.)

Deuxième Tableau

(Le théâtre représente la grande salle du palais de Munster. Une table placée sur une estrade s'élève au milieu du théâtre. On monte de chaque côté par des degrés. Autour de l'estrade circulent des pages, des valets portants des vins et des corbeilles chargées des fruits. Au fond à droite et à gauche de grandes grilles de fer conduisant en dehors du palais. Jean est assis seul, pâle et triste devant une table couverte de mets où étincellent des vases d'or. De jeunes filles le servent, des autres dansent autour de la table, pendant que des anabaptistes célèbrent les louanges du Prophète. De tous les côtés les flambeaux étincellent, des lustres brillent au plafond.)

▼CHOEUR▲
Hourra! Hourra! Hourra! etc.
Gloire, gloire!
Gloire au Prophète! Gloire!
A ses élus, a ses élus
transports joyeux!
A ses élus, etc.
A nous la terre, a nous le ciel!
A nous, etc.
Amours, plaisirs, transports joyeux!
Gloire, etc.
Gloire au grand Prophète et Roi!
A ses élus, etc.
Hourra! etc.
Plaisirs et fête,
les voluptés, les voluptés des cieux,
a nous les voluptés des cieux!
Prophète, Prophète, Prophète!
A tes élus, etc.
Gloire, gloire, gloire, gloire!

▼LES TROIS ANABAPTISTES▲
Une heure encore et tombe sa puissance,
mais le lion pourrait
coûter cher à livrer.
Au sein des voluptés,
Ah! tâchez de l'enivrer
pour enchaîner sans résistance,
pour enchaîner le lion sans résistance!

(Jonas voyant arriver de loin Jean, fait signe de recommencer les danses.)

▼CHOEUR▲
Hourra! etc.
Gloire! Gloire!

▼JEAN▲
(à part à voix basse à deux de ses officiers)
Quand vous verrez entrer nos ennemis,
que ces grilles d'airain se ferment
sur ce gouffre d'où vont jaillir
le salpêtre et le souffre.
Puis hâtez-vous de fuir
loin de ces lieux maudits,
vous mes seuls, mes derniers amis.

(Les officiers sortent. Jean se retourne avec un air riant vers les convives, invitant de geste à les jeunes filles à lui présenter la coupe et le vin. Dans des jeunes filles, lesquelles sur un geste de Jonas viennent offrir à genoux à Jean une coupe dorée que les autres femmes se hâtent de remplir.)

▼JEAN▲
(avec force et une gaieté sauvage)
Versez! Que tout respire,
l'ivresse et le délire,
que tout cède à l'empire
de ce nectar brûlant!
O la céleste fête,
o triomphe si brillant!
Compagnons du Prophète,
la récompense vous attend!
Venez! Venez! Venez! Venez!
Versez! etc.

(Les danses recommencent)

▼CHOEUR▲
Vive! Vive, vive le Prophète!
Vive le Prophète, vive!

▼JEAN▲
Versez! Que tout respire,
l'ivresse et le délire,
que résonne la lire et…

(Dans ce moment les portes s'ouvrent avec fracas. Oberthal, à la tête des troupes impériales, s'élance dans la salle.)

▼LES TROIS ANABAPTISTES, CHOEUR▲
La mort, la mort, la mort, aux faux Prophète!

▼JEAN▲
Que ces portes d'airain
soient celles de tombeau,
qu'on ferme sur eux!

(On entend fermer en dehors les grandes grilles du fond.)

▼JONAS▲
Le tyran est à nous!

▼JEAN▲
A Dieu seul j'appartiens!

▼OBERTHAL▲
Il est en mon pouvoir!

▼JEAN▲
Vous êtes tout au mien!

(Bruit souterrain. La fumée se fait jour par le plancher)

▼JEAN▲
(à Jonas)
Vous, traîtres!

(á Oberthal)

Vous, tyran, que je entraîne
en ma chute!
Dieu dicta votre arrêt!
Et moi je l'exécute!
Tous coupables et tous punis!

(Une grande explosion se fait entendre. Un pan de mur s'écroule au fond du théâtre. En ce moment une femme, les cheveux épars et le corps sanglant, se fait jour a travers le décombres et vient tomber dans le bras de Jean, qui pousse un cri reconnaissant sa mère.)

▼JEAN▲
Ah! Ma mère!

▼FIDÈS▲
Moi qui viens te pardonner
et mourir avec toi!

(Jean se jette dans les bras de sa mère.)

▼FIDÈS, JEAN▲
Ah! Viens, divine flamme,
vers Dieu qui nous réclame,
Ah! viens porter notre âme,
libre de ses erreurs!

(Les chœurs courent en désordre sur le théâtre en cherchent une issue pour échapper à l'incendie qui se propage toujours d'avantage.)

▼CHOEUR▲
Le feu gagnant le faîte
nous ferme la retraite;
notre mort s'apprête,
et l'enfer nous attend!

▼FIDÈS, JEAN▲
Ah! Viens, divine flamme,
vers Dieu qui nous réclame,
Ah! viens porter notre âme
au ciel, au ciel!

▼CHOEUR▲
Le feu gagnant le faîte, etc.

(L'estrade élevée sur laquelle Jean et sa mère se tiennent, s'écroule au milieu des flammes, qui pénètrent de tous parts. Tout s'embrase, le palais s'écroule.)
ACTE V


Premier Tableau

Le théâtre représente un caveau voûté dans le palais de Munster. A gauche un escalier par lequel on descend dans le caveau. Au fond, au milieu du mur, une dalle saillante sur laquelle des caractères sont tracés, A droite une porte de fer donnât sur la campagne. Zacharie, Mathisen, Jonas sont tous debout

MATHISEN
s'adressant à Jonas
Ainsi vous l'attestez?

ZACHARIE
Oui, redoublant d'efforts,
vers Munster l'Empereur
et s'avance et s'apprête
a foudroyer ces murs!

MATHISEN
Comment fuir la tempête!

ZACHARIE
tirant un parchemin de sa poche
Il offre sauvegarde â nous,
a nos trésors,
si nous lui livrons le Prophète.
Qu'en dites vous?

Tous les trois se regardent un instant sans répondre, puis croisent les bras sur la poitrine et parlent en baissant la tête.

LES TROIS ANABAPTISTES
Du ciel la volonté soit faite!

Ils sortent. Apparaissent sur les marches de l'escalier à gauche plusieurs soldats. L'un tient un flambeau, les autres entraînent Fidès. Les soldats montrent à Fidès un banc de pierre, lui font signe de s'asseoir et remontent l'escalier par où ils partent.

FIDÈS
O prêtes de Baal,
Où m'avez-vous conduit?
Quoi! Les murs d'un cachot!
Ah! L'on retient mes pas
quand de mon fils
Berthe veut le trépas
mon fils! il n'est plus!
Il renia de sa mère
que sur son front coupable
éclate ta colère,
frappe, frappe, toi qui punis
tous les enfants ingrats!
Non, non, non, grâce,
grâce pour lui!

O toi qui m'abandonnes,
mon cœur, mon cœur est désarmé,
est désarmé;
ta mère te pardonne,

pleurant

Adieu, adieu, adieu, adieu!
Mon pauvre enfant!
Mon bien-aimé soit pardonné!
Sois pardonné!
Je t'ai donné mon cœur,
je t'ai donné mes vœux,
et maintenant, maintenant
pour que tu sois heureux,
pour que tu sois heureux,
je te donne ma vie,
et mon âme ravie
t'attendra dans les cieux!
Ah! O toi qui m'abandonnes, etc.

Un officier arrive, descendent par l'escalier.

UN OFFICIER
Femme, prosterne-toi,
prosterne-toi devant ton divin maître!
Le Roi Prophète à tes yeux va paraître!

il sort

FIDÈS
d'une voix suffoquée par l'émotion
Il va venir!… Je le vais à voir!…¡Hélas!
Bien coupable peut-être! Dieu! Dieu!

avec exaltation

Comme un éclair se précipité
dans son âme,
frappe mon fils, ô vérité,
de ta flamme!
Frappe mon fils, etc.
Qu'il soit dompté
comme l'airain par le feu!
Ah! comme un éclair, etc.
Céleste flamme,
touche enfin son âme!
Sainte phalange,
rends-lui son ange,
esprit divin, descend vainqueur,
descend, descend vainqueur
sainte phalange, etc.
De tes rayons perce son cœur,
son cœur;
et de crime, sous ses pas,
l'abîme noir ne s'ouvre pas!
Comme un éclair!
Je ramène mon enfant,
mon enfant au Dieu sauveur,
au Dieu sauveur!

Jean entre habillé comme au quatrième acte, mais enveloppé d'un manteau et la couronne sur la tête. Il faut un signe à l'officier, qui s'éloigne. Il descend l'escalier et court vers sa mère.

JEAN
Ma mère! Ma mère! Ma mère!

FIDÈS
ave un ton sévère et solennel
Arrière! Prophète et fils de Dieu,
tu n'est plus dans ce temple,
où debout tu m'osais braver!
Et maintenant que Dieu seul nos contemple,
a genoux, à genoux!

JEAN
Ah! pardon pour fils égaré!

FIDÈS
Mon fils! je n'en ai pas!
Ce fils tan pleuré…

JEAN
De honte je rougis!

FIDÈS
…était pur, pur devant Dieu!
Mais toi! mais toi!
Mais toi! mais toi!
Mais toi, mais toi qu'on déteste,
tyran, sous la colère céleste,
tremblant, toi dont les mains
sont teintes du sang,
va t'en, va t'en,
tu n'es plus rien pour moi! Va t'en!
Va t'en! Tu n'es plus rien pour moi!
Loin de mon cœur, loin de mes yeux,
loin de mon cœur et de mes yeux,
du sang! Du sang! Ah! Va t'en!
Du sang! Ah! Va t'en, etc.

JEAN
Ma mère, hélas!
Me maudit, me déteste,
quand j'allais la presser dans mes bras,
et son courroux est le courroux céleste!
Hélas! Autour de moi
cachez ces flots de sang!
Image horrible, éloigne-toi, va t'en,
Ah! de mon cœur éloigne-toi, va t'en
remords vengeur, éloigne-toi, va t'en.

FIDÈS
Va t'en! tyran! Va t'en!
Tu n'es plus rien pour moi!

JEAN
Ah! c'est mon seul amour
qui m'a rendu coupable,
je ne voulais d'abord, en ma juste fureur,
que venger de Berthe le trépas et l'honneur,
et puis le sang versé
vous rend impitoyable,
ces maîtres insensés.
Ces tyrans orgueilleux,
j'ai voulu les punir!

FIDÈS
Et tu les as surpassés!
Aucun d'eux n'eût osé,
faussaire et sacrilège,
se proclamer l'égal
de Dieu qui nos protège!
Mais toi, Prophète funeste, effrayant
sous le céleste courroux blasphémant,
loin de mon cœur et de mes yeux, etc.

JEAN
Hélas! hélas!
Ah! Dans mon cœur tout déchiré
quels remords affreux!
Ah! Pitié! Ah! Pitié! Pitié!
Remords vengeur, éloigne-toi, va t'en,
remords vengeur, etc.
Pitié de moi!

FIDÈS
Eh bien! Si le remords
s'éveille dans ton âme,
et si peux encore
être digne de moi,
renonce a ton pouvoir,
a ceux qui t'ont fait roi!

JEAN
Déserter mes soldats?

FIDÈS
C'est Dieu qui te réclame!

JEAN
Par eux je fus vainqueur!

FIDÈS
Par eux tu fus infâme!

JEAN
Ils diront que j'ai fui!

FIDÈS
Vers le ciel, vers l'honneur!

Elle conduit Jean sur le devant du théâtre, lui montrant le ciel.

A la voix de ta mère,
le ciel peut, le ciel peut se rouvrir!
Dieu n'a plus de colère
devant la repentir
le ciel peut se rouvrir!

JEAN
répétant involontairement
¡Peut se rouvrir!

FIDÈS
Oui, par lui, je l'atteste,
tous les crimes s'effaceront
et le pardon du ciel
descendra sur ton front!

JEAN
C'est sa voix qui me l'atteste,
et le pardon céleste
sur mon front!

FIDÈS
A la voix de ta mère,
le ciel peut se rouvrir, etc.
Ah! Les jours d'innocence
a ma voix renaîtront
et le pardon du ciel
descendra sur ton front!

JEAN
En moi quel combats!

FIDÈS
Viens, mon fils!

JEAN
Quoi! Se pourrait-il?

FIDÈS
Oui, mon fils!

JEAN
Quoi! ce nom?

FIDÈS
Ce nom si tendre…

JEAN
Votre cœur…

FIDÈS
Mon cœur est prêt…

JEAN
A me le rendre.

FIDÈS
A te le rendre.

JEAN
Pour toujours!

FIDÈS
Pour toujours!

JEAN
Mais mon crime?

FIDÈS
S'effacera!

JEAN
Le pardon?

FIDÈS
Descendra!

JEAN
Le ciel pourrait me pardonner?

FIDÈS
Viens à ta mère! Viens!
Mon fils!

JEAN
Ma mère!

Elle ouvre les bras à son fils, qui s'y jette avec transport.

FIDÈS
Mon fils!

JEAN
Ma mère!

FIDÈS
Ah! viens, il est temps,
il en est temps encore.
Entends ma voix fidèle,
entends ma voix fidèle,
sois courageux,
sois courageux, sois fort!
Le Dieu du ciel t'appelle à lui!
Ah! Viens, il en est temps,
il en est temps encore,
sois à l'honneur fidèle,
sois à l'honneur fidèle,
sois courageux,
sois courageux, sois fort!
Le Dieu du ciel t'appelle à lui!
Et bientôt du Seigneur
le pardon descendra!
Et bientôt le pardon céleste
descendra sur toi!

JEAN
Oui, je le veux,
il en est temps encore,
et trop longtemps rebelle,
et trop longtemps rebelle,
changeons enfin
changeons enfin mon sort!
Le Dieu du ciel m'appelle
et bientôt du Seigneur
le pardon descendra!
Et bientôt le pardon céleste
descendra sur moi!

Berthe habillée du blanc et tenant un flambeau à la main, entre par la porte à droite qui donne sur la campagne. Elle s'avance vers le mur du fond et touche la dalle de pierre, que s'ouvre.

BERTHE
Voici le souterrain…
Et la dalle de pierre!

JEAN
O ciel!

FIDÈS
courant vers Berthe
Berthe!

BERTHE
Fidès!

FIDÈS
Ici que viens-tu faire?

BERTHE
Par mon aïeul, gardien
du palais de Munster,
je savais les amas
de salpêtre, et der fer,
cachés dans ce caveau,

montrant le flambeau qu'elle tient

Cette flamme propice
peut en quelques instants
embraser l'édifice,
ce Prophète et les siens et moi-même,
et moi-même avec eux!

FIDÈS
à Jean
Que dit-elle?
Grand Dieu! mon fils!

BERTHE
apercevant Jean
Ah! qu'ai-je vu!
Toi, mon bien-aimé!
C'est toi que m'es rendu!

FIDÈS
Parlez bas, parlez bas!

BERTHE
Ah! combien ma douleur fut amère,
mon bien-aimé, mon bien-aimé,
que ma douleur fut amère!
Je t'ai cru tombé sous les coups
de ce Prophète sanguinaire,
ce monstre en horreur à la terre…

FIDÈS
O Berthe!

BERTHE
Ce monstre aux enfers destiné!

FIDÈS
Ah! que dis-tu!

JEAN
à voix basse a sa mère
Ah! de grâce, taisez-vous!
Pitié, pitié!
Ah! ne me trahissez pas!

FIDÈS
Ah! ne maudis personne!
J'ai retrouve mon fils;
la haine m'abandonne!
Allons! Partons!

BERTHE
Oui, partons!

LES TROIS
Loin de la ville, loin de la ville,
qu'un humble asile, qu'un humble asile,
comble nos vœux,
comble nos vœux, comble nos vœux!
Qu'un sort heureux, qu'un sort heureux,
comble nos vœux!
Qu'un sort tranquille,
comble, comble nos vœux!
Loin de la ville, etc.
Douce retraite, sombre et discrète,
qui nous permette de vivre heureux!
Allons, viens et partons
pour un humble séjour
pour un humble séjour
où nous vivrons heureux,
allons, partons, partons!

Un officier suivi de plusieurs soldats, descend précipitamment l'escalier â gauche.

UN OFFICIER
à Jean
On t'a trahi! Par ruse
en ce palais s'est glissé l'ennemi!

JEAN
L'ennemi!

UN OFFICIER
Ils veulent t'immoler
au milieu de la fête
de ton couronnement…
Viens les punir, Prophète!

BERTHE
avec un cri d'épouvante
Prophète! Prophète!

JEAN
Grâce!

BERTHE
Non!

FIDÈS
Grâce!

BERTHE
Non!

JEAN
Grâce!

BERTHE
Va! Va! Va!
O spectre, ô spectre épouvantable,
o terre, ô terre, entre ouvre-toi!
Fuis! Que ta main coupable
n'approche pas de moi!
Va! fuis loin de moi! Va!
Ton spectre fut un glaive,
tes droits son des forfaits,
et le sang qui s'élève
nous sépare pour jamais,
et le sang, etc.

FIDÈS
Viens, partons,
il faut nous presser!

JEAN
Non! je reste à présent!
A la mort, à la mort je me livre!
Berthe sait mes forfaits;
qu'ai-je besoin de vivre?
Berthe m'avait maudit,
Berthe m'avait maudit,
Dieu, oui, devait l'exaucer!
Tourment, tourment épouvantable!

BERTHE
Va! fuis!

FIDÈS
Tourment!

JEAN
O terre, ô terre, entrouvre-toi!
Plus de grâce au coupable,
plus de pitié pour moi,
plus de pitié, plus de pitié, ¡Ah!

FIDÈS
…affreux! grâce pour lui!
Pitié pour lui, pitié, ¡Ah!

BERTHE
Va! fuis!
N'approche pas!
Va! Fuis! ¡Ah!
Ton spectre fut un glaive, etc.

LES TROIS
Et le sang qui se élève
nous/les sépare à jamais,
et la sang, etc.

BERTHE
Je t'aimais…toi que je maudis,
je t'aime encore peut-être,
et m'en punis!

Berthe se frappe d'un poignard et tombe dans les bras de Fidès

FIDÈS, JEAN
Ah!

JEAN
Morte! Morte!

Jean fait signe aux soldats d'emmener sa mère et Berthe, puis il reprend la couronne, qui était restée sur la table de pierre, et la remet sur son front.

Veillez sur ma mère!
Moi! je reste en ces lieux
pour punir les coupables!

Les soldats entraînent Fidès.

FIDÈS
Mon fils! Mon fils! Mon fils! Mon fils!

Silence, pendant lequel Jean regarde si Fidès et assez éloignée.

JEAN
Et maintenant, vous qui m'avez perdu,
tous serez punis!

Il remonte vivement l'escalier à gauche après avoir regardé le caveau que Berthe a montré au commencement de la scène.

Deuxième Tableau

Le théâtre représente la grande salle du palais de Munster. Une table placée sur une estrade s'élève au milieu du théâtre. On monte de chaque côté par des degrés. Autour de l'estrade circulent des pages, des valets portants des vins et des corbeilles chargées des fruits. Au fond à droite et à gauche de grandes grilles de fer conduisant en dehors du palais. Jean est assis seul, pâle et triste devant une table couverte de mets où étincellent des vases d'or. De jeunes filles le servent, des autres dansent autour de la table, pendant que des anabaptistes célèbrent les louanges du Prophète. De tous les côtés les flambeaux étincellent, des lustres brillent au plafond.

CHOEUR
Hourra! Hourra! Hourra! etc.
Gloire, gloire!
Gloire au Prophète! Gloire!
A ses élus, a ses élus
transports joyeux!
A ses élus, etc.
A nous la terre, a nous le ciel!
A nous, etc.
Amours, plaisirs, transports joyeux!
Gloire, etc.
Gloire au grand Prophète et Roi!
A ses élus, etc.
Hourra! etc.
Plaisirs et fête,
les voluptés, les voluptés des cieux,
a nous les voluptés des cieux!
Prophète, Prophète, Prophète!
A tes élus, etc.
Gloire, gloire, gloire, gloire!

LES TROIS ANABAPTISTES
Une heure encore et tombe sa puissance,
mais le lion pourrait
coûter cher à livrer.
Au sein des voluptés,
Ah! tâchez de l'enivrer
pour enchaîner sans résistance,
pour enchaîner le lion sans résistance!

Jonas voyant arriver de loin Jean, fait signe de recommencer les danses.

CHOEUR
Hourra! etc.
Gloire! Gloire!

JEAN
à part à voix basse à deux de ses officiers
Quand vous verrez entrer nos ennemis,
que ces grilles d'airain se ferment
sur ce gouffre d'où vont jaillir
le salpêtre et le souffre.
Puis hâtez-vous de fuir
loin de ces lieux maudits,
vous mes seuls, mes derniers amis.

Les officiers sortent. Jean se retourne avec un air riant vers les convives, invitant de geste à les jeunes filles à lui présenter la coupe et le vin. Dans des jeunes filles, lesquelles sur un geste de Jonas viennent offrir à genoux à Jean une coupe dorée que les autres femmes se hâtent de remplir.

JEAN
avec force et une gaieté sauvage
Versez! Que tout respire,
l'ivresse et le délire,
que tout cède à l'empire
de ce nectar brûlant!
O la céleste fête,
o triomphe si brillant!
Compagnons du Prophète,
la récompense vous attend!
Venez! Venez! Venez! Venez!
Versez! etc.

Les danses recommencent

CHOEUR
Vive! Vive, vive le Prophète!
Vive le Prophète, vive!

JEAN
Versez! Que tout respire,
l'ivresse et le délire,
que résonne la lire et…

Dans ce moment les portes s'ouvrent avec fracas. Oberthal, à la tête des troupes impériales, s'élance dans la salle.

LES TROIS ANABAPTISTES, CHOEUR
La mort, la mort, la mort, aux faux Prophète!

JEAN
Que ces portes d'airain
soient celles de tombeau,
qu'on ferme sur eux!

On entend fermer en dehors les grandes grilles du fond.

JONAS
Le tyran est à nous!

JEAN
A Dieu seul j'appartiens!

OBERTHAL
Il est en mon pouvoir!

JEAN
Vous êtes tout au mien!

Bruit souterrain. La fumée se fait jour par le plancher

JEAN
à Jonas
Vous, traîtres!

á Oberthal

Vous, tyran, que je entraîne
en ma chute!
Dieu dicta votre arrêt!
Et moi je l'exécute!
Tous coupables et tous punis!

Une grande explosion se fait entendre. Un pan de mur s'écroule au fond du théâtre. En ce moment une femme, les cheveux épars et le corps sanglant, se fait jour a travers le décombres et vient tomber dans le bras de Jean, qui pousse un cri reconnaissant sa mère.

JEAN
Ah! Ma mère!

FIDÈS
Moi qui viens te pardonner
et mourir avec toi!

Jean se jette dans les bras de sa mère.

FIDÈS, JEAN
Ah! Viens, divine flamme,
vers Dieu qui nous réclame,
Ah! viens porter notre âme,
libre de ses erreurs!

Les chœurs courent en désordre sur le théâtre en cherchent une issue pour échapper à l'incendie qui se propage toujours d'avantage.

CHOEUR
Le feu gagnant le faîte
nous ferme la retraite;
notre mort s'apprête,
et l'enfer nous attend!

FIDÈS, JEAN
Ah! Viens, divine flamme,
vers Dieu qui nous réclame,
Ah! viens porter notre âme
au ciel, au ciel!

CHOEUR
Le feu gagnant le faîte, etc.

L'estrade élevée sur laquelle Jean et sa mère se tiennent, s'écroule au milieu des flammes, qui pénètrent de tous parts. Tout s'embrase, le palais s'écroule.
最終更新:2016年03月24日 04:32